Les Dessous de Peach

Tout d'abord, nous parlons de Nintendo of Europe (et hop un pingback, en espérant que mon article leur arrive en plein dans les dents), basé à Francfort sur le Main en Allemagne.

Pourquoi est-ce si nul de bosser là-bas ?

La journée débute à 8H45, pause de la matinée de 10H00 à 10H10, déjeuner de 30 minutes soit à 12H00 soit à 12H30 (fonction de la salle où vous travaillez). Ensuite pause de 15H00 à 15H10, fin des "cours", 17H17.

Votre arrivée, votre départ, ainsi que chaque pause doivent être "badgés". C'est à dire que chaque testeur doit passer sa carte magnétique devant la "badgeuse" (= pointeuse) 8 fois par jour... Une (1)  minute de retard et vous serez convoqué chez le patron pour vous expliquer. Trois (3) retards de ce type (donc une seule et unique minute) et vous serez viré.

Il s'agit d'effectuer des tests de localisation. En gros, vous devez lire l'intégralité du texte présent dans un jeu et vous assurer qu'il est correct (bonnes traductions, absence de faute de grammaire, de ponctuation, etc.). Assez fréquemment un jeu est retardé. C'est à dire que vous devez attendre plusieurs heures (ou jours) avant de recevoir un jeu fonctionnel sur lequel travailler. Durant cette période : interdiction de "jouer", lire un magazine, ou surfer sur le net. Vous devez attendre les bras croisés que le jeu arrive... et relire les procédures de test. Pas de bavardage non plus, encore moins d'aller retour incessants entre les toilettes (le seul endroit où se reposer sans pointer) et votre "bureau".

Ici, pas de gros moyens. Pas de bureau attitré. Pas de PC attitré. Et surtout... un PC pour deux (2) testeurs. L'un entre un bug sur le PC, l'autre attend que le PC soit libre pour entrer son bug.

Vous voulez (ou devez) faire une capture d'écran pour expliquer un bug ? Pas de problème : un appareil photo traine dans la salle. Trouvez-le, trouvez des piles, et faites votre photo sous la table (pour éviter le reflets des néons).

Ici encore, les critères sont bas. Extrêmement bas. Vous pouvez entrer des bugs dans le logiciel dédié, mais n'avez pas le droit d'éditer votre bug. Une petite faute de frappe et vous êtes obligé d'aller voir le chef de projet (qui semble toujours débordé) pour lui demander d'éditer votre bug.

Vous voulez utilisez Internet au boulot ? Oubliez ! C'est formellement (et tacitement) interdit. Il est même "impossible" de s'y connecter, les ports étant bloqués. Ceci-dit, il existe des moyens de contourner ces protections, mais attention si on vous prend la main dans le sac, vous serez viré sur-le-champ, et "black listé" (j'y reviendrai).

Tous les testeurs entrent chez Nintendo par le biais d'agence d'interim. Rien de choquant. Je ne devrais pas dire cela, mais EA et Vault font exactement la même chose, et ce ne sont pas les seuls.

Les contrats dans le monde du JV (plus particulièrement du test)sont réputés pour être assez mauvais (plein d'heures, peu de sous). Chez Nintendo, comptez entre 1000€ et 1500€ net / mois, à raison de 40 (environ ?) heures par semaine (faites le calcul exact avec les horaires). Ce qui est plutôt pas mal.... si vous gagnez 1500€. Pourquoi une telle différence ? Simplement parce qu'il y a plusieurs agences d'Interim (dont Fitarbeiten, Alpha, RKM, Adecco, etc.). Toutes offrent un salaire différent... et une fois signé avec l'une d'elle impossible d'en changer... Nintendo n'aime pas ça, et refusera de vous ré-embaucher.

Concernant les contrats, ils sont plutôt précaires. Soit un CDD de 3 mois renouvelables. Soit un faux CDI, qui dit que vous êtes embauché en CDI "aussi longtemps qu'il y a du travail pour vous". Cela peut durer 2 ans, comme 2 jours.

Avec ce type de contrat (et aussi avec les CDD renouvelables) attendez-vous à flippez à chaque fin de projet. la grande question que tout le monde se pose constamment : "Aurais-je du taff après ce projet ?" et la réponse que toute personne ayant bossé chez Nintendo connait : "With Nintendo you never know".

Je parlais de testeurs virés black listés, mais de quoi s'agit-il ? Certains testeurs se sont fait virer pour des raisons plus ou moins valables, et étant considérés comme des éléments "dangereux" (pour avoir contesté la décision) leur photo a été placardée à l'entrée des locaux, où le gardien avait pour ordre de les virer manu militari s'ils essayaient de revenir.

Bref.. que de bonnes choses. Si jamais on vous propose un job là-bas, n'hésitez pas à répondre poliment :

Du fait de la situation de cette fin de siècle, on se doit de se remémorer la majorité des problématiques envisageables.